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Oui, continua Crillon en prenant les mains de la marquise, et la conduisant près de la fenêtre, oui, il pleure!
il se désole, cela fend le coeur, harnibieu, est-ce que vous souffrirez cela? Un roi de France avec des yeux
rouges!
Et moi! ai-je les yeux secs?
Bah!...une femme: et pourquoi toute cette colère, tout cet esclandre, parce que le roi a été au bal masqué,
parce qu'il vous a trompée. Mais, madame, il vous a peut-être trompée déjà trente fois, et vous ne vous êtes
pas fâchée pour cela... Bon! je dis de belles sottises, reprit-il en voyant s'assombrir encore le visage de
Gabrielle. C'est de l'invention pure. Le roi ne vous a jamais trompée, pas même avant-hier. Il m'a raconté cela
en détail. Cela ne vaut pas un froncement de sourcils! Harnibieu! quand votre fils sera grand, est-ce qu'il ne
trompera pas les femmes, et vous en rirez... Riez donc!
Gabrielle balbutia quelques mots entrecoupés de soupirs. C'étaient les mêmes plaintes, les mêmes résolutions
toujours empreintes de cette douce opiniâtreté qui distingue les bons coeurs, injustement froissés.
Si c'est par amour-propre que vous partez, dit Crillon, vous avez tort. Qu'a fait le pauvre roi? il vous a priée
lui-même, il vous a fait prier; votre amour-propre est cent fois à couvert. Mais prenez-y garde, vous
exagérez!... Quoi! ce cher sire a un enfant, un beau petit enfant tout frais baptisé. Il s'est déjà habitué à ses
caresses, et voilà que vous lui ôteriez cet enfant, son petit compagnon!... Harnibieu! c'est dur, c'est mal! Ne
faites pas cela, car je vous appellerais un méchant coeur.
Cher monsieur de Crillon, n'augmentez point ma peine. N'ébranlez pas ma résolution. Il ne me reste plus
que mon enfant et Dieu....
XVII. AMBASSADES 149
La belle Gabrielle, vol. 2
Et moi, donc! s'écria le brave chevalier attendri; çà! j'ai promis au roi que vous resteriez; et quand je devrais
coucher en travers de la porte, vous ne sortirez pas.
Crillon parlait encore, qu'au bas de l'escalier retentit une voix haletante qui criait:
Je veux parler à M. de Crillon.
Au diable l'animal, grommela le chevalier dérangé dans sa péroraison.
Dites que je suis un de ses gardes.
Qu'est-ce que cela me fait, pensa Crillon.
Que je m'appelle Pontis, et que je viens pour un très-grand malheur.
Il n'en fait jamais d'autres, ce coquin-là, dit Crillon à Gabrielle; mais son grand malheur attendra.
Ajoutez, hurla la voix, que c'est de la part de M. Espérance.
Crillon bondit jusqu'à la rampe de l'escalier, se pencha en dehors et cria d'une voix de tonnerre.
Monte, bélître!
Espérance, murmura Gabrielle, dont un souvenir innocent et frais traversa l'esprit fatigué par tant de larmes.
Crillon et Pontis étaient déjà face à face.
Monsieur, dit le Dauphinois, rouge, tremblant et suffoquant à chaque mot, où est Espérance?
Pardieu, est-ce que je le sais?
Comment, vous ne le savez pas? Mais, monsieur, hier au soir des archers sont venus chez lui.
Des archers? pourquoi faire?
Des archers, répéta Gabrielle en s'avançant.
Oui, madame, des archers, au nom du roi.
Eh bien, après? demanda Crillon.
Après, ils ont emmené Espérance.
Où? cria le chevalier.
Puisque je vous le demande, monsieur!
Mais, tu t'es informé; continua Crillon en secouant son garde qu'il tenait par le buffle.
Pardieu!
XVII. AMBASSADES 150
La belle Gabrielle, vol. 2
Aux gens, aux voisins, à Zamet?
Il est voisin de Zamet, demanda Gabrielle.
Oui, madame, rue de la Cerisaie.
Rue de la Cerisaie, se dit la jeune femme, frappée d'une idée subite.
Mais, reprit Crillon, pourquoi ces archers? que lui voulaient-ils? qu'a-t-il fait?
Rien.
Qui a-t-il vu, reçu?...
Personne... qu'un homme enveloppé d'un manteau, qu'on l'a vu reconduire avant-hier du jardin dans la cour
à neuf heures et demie du soir.
Gabrielle tressaillit.
Au moment, continua Pontis, où je paradais dans son carrosse.
Mais cet homme, quel est-il?
Eh! le sait-on!
Je crois que je le sais, interrompit Gabrielle saisie d'un tremblement nerveux... Cette maison qu'habitait M.
Espérance, elle est belle?
Oui.
Neuve?
Toute neuve.
Une grande cour, un jardin qui communique....
Avec ceux de Zamet. Eh bien?
C'est là que M. Espérance a reconduit un homme avant-hier?
Oui, madame.
Eh bien, cet homme c'était le roi.
Ah! je comprends! s'écria le chevalier, le roi sortait de chez Zamet par la brèche du mur.
Et le roi, dit Gabrielle, s'est figuré que j'avais été avertie par le pauvre Espérance, et il s'en est vengé.
Je ne comprends plus.
Vous comprendrez plus tard.
XVII. AMBASSADES 151
La belle Gabrielle, vol. 2
Crillon allait répondre lorsqu'un valet se précipita dans la chambre de Gabrielle, en lui offrant un paquet de
forme étrange et en lui disant à l'oreille.
Tenez, madame, examinez vite ceci d'où dépend, dit-on, la vie du roi!
Gabrielle déchira à la hâte l'enveloppe qui recouvrait une figurine modelée en plâtre; à la statue était attachée
un billet qu'elle dévora en pâlissant. [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]
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Oui, continua Crillon en prenant les mains de la marquise, et la conduisant près de la fenêtre, oui, il pleure!
il se désole, cela fend le coeur, harnibieu, est-ce que vous souffrirez cela? Un roi de France avec des yeux
rouges!
Et moi! ai-je les yeux secs?
Bah!...une femme: et pourquoi toute cette colère, tout cet esclandre, parce que le roi a été au bal masqué,
parce qu'il vous a trompée. Mais, madame, il vous a peut-être trompée déjà trente fois, et vous ne vous êtes
pas fâchée pour cela... Bon! je dis de belles sottises, reprit-il en voyant s'assombrir encore le visage de
Gabrielle. C'est de l'invention pure. Le roi ne vous a jamais trompée, pas même avant-hier. Il m'a raconté cela
en détail. Cela ne vaut pas un froncement de sourcils! Harnibieu! quand votre fils sera grand, est-ce qu'il ne
trompera pas les femmes, et vous en rirez... Riez donc!
Gabrielle balbutia quelques mots entrecoupés de soupirs. C'étaient les mêmes plaintes, les mêmes résolutions
toujours empreintes de cette douce opiniâtreté qui distingue les bons coeurs, injustement froissés.
Si c'est par amour-propre que vous partez, dit Crillon, vous avez tort. Qu'a fait le pauvre roi? il vous a priée
lui-même, il vous a fait prier; votre amour-propre est cent fois à couvert. Mais prenez-y garde, vous
exagérez!... Quoi! ce cher sire a un enfant, un beau petit enfant tout frais baptisé. Il s'est déjà habitué à ses
caresses, et voilà que vous lui ôteriez cet enfant, son petit compagnon!... Harnibieu! c'est dur, c'est mal! Ne
faites pas cela, car je vous appellerais un méchant coeur.
Cher monsieur de Crillon, n'augmentez point ma peine. N'ébranlez pas ma résolution. Il ne me reste plus
que mon enfant et Dieu....
XVII. AMBASSADES 149
La belle Gabrielle, vol. 2
Et moi, donc! s'écria le brave chevalier attendri; çà! j'ai promis au roi que vous resteriez; et quand je devrais
coucher en travers de la porte, vous ne sortirez pas.
Crillon parlait encore, qu'au bas de l'escalier retentit une voix haletante qui criait:
Je veux parler à M. de Crillon.
Au diable l'animal, grommela le chevalier dérangé dans sa péroraison.
Dites que je suis un de ses gardes.
Qu'est-ce que cela me fait, pensa Crillon.
Que je m'appelle Pontis, et que je viens pour un très-grand malheur.
Il n'en fait jamais d'autres, ce coquin-là, dit Crillon à Gabrielle; mais son grand malheur attendra.
Ajoutez, hurla la voix, que c'est de la part de M. Espérance.
Crillon bondit jusqu'à la rampe de l'escalier, se pencha en dehors et cria d'une voix de tonnerre.
Monte, bélître!
Espérance, murmura Gabrielle, dont un souvenir innocent et frais traversa l'esprit fatigué par tant de larmes.
Crillon et Pontis étaient déjà face à face.
Monsieur, dit le Dauphinois, rouge, tremblant et suffoquant à chaque mot, où est Espérance?
Pardieu, est-ce que je le sais?
Comment, vous ne le savez pas? Mais, monsieur, hier au soir des archers sont venus chez lui.
Des archers? pourquoi faire?
Des archers, répéta Gabrielle en s'avançant.
Oui, madame, des archers, au nom du roi.
Eh bien, après? demanda Crillon.
Après, ils ont emmené Espérance.
Où? cria le chevalier.
Puisque je vous le demande, monsieur!
Mais, tu t'es informé; continua Crillon en secouant son garde qu'il tenait par le buffle.
Pardieu!
XVII. AMBASSADES 150
La belle Gabrielle, vol. 2
Aux gens, aux voisins, à Zamet?
Il est voisin de Zamet, demanda Gabrielle.
Oui, madame, rue de la Cerisaie.
Rue de la Cerisaie, se dit la jeune femme, frappée d'une idée subite.
Mais, reprit Crillon, pourquoi ces archers? que lui voulaient-ils? qu'a-t-il fait?
Rien.
Qui a-t-il vu, reçu?...
Personne... qu'un homme enveloppé d'un manteau, qu'on l'a vu reconduire avant-hier du jardin dans la cour
à neuf heures et demie du soir.
Gabrielle tressaillit.
Au moment, continua Pontis, où je paradais dans son carrosse.
Mais cet homme, quel est-il?
Eh! le sait-on!
Je crois que je le sais, interrompit Gabrielle saisie d'un tremblement nerveux... Cette maison qu'habitait M.
Espérance, elle est belle?
Oui.
Neuve?
Toute neuve.
Une grande cour, un jardin qui communique....
Avec ceux de Zamet. Eh bien?
C'est là que M. Espérance a reconduit un homme avant-hier?
Oui, madame.
Eh bien, cet homme c'était le roi.
Ah! je comprends! s'écria le chevalier, le roi sortait de chez Zamet par la brèche du mur.
Et le roi, dit Gabrielle, s'est figuré que j'avais été avertie par le pauvre Espérance, et il s'en est vengé.
Je ne comprends plus.
Vous comprendrez plus tard.
XVII. AMBASSADES 151
La belle Gabrielle, vol. 2
Crillon allait répondre lorsqu'un valet se précipita dans la chambre de Gabrielle, en lui offrant un paquet de
forme étrange et en lui disant à l'oreille.
Tenez, madame, examinez vite ceci d'où dépend, dit-on, la vie du roi!
Gabrielle déchira à la hâte l'enveloppe qui recouvrait une figurine modelée en plâtre; à la statue était attachée
un billet qu'elle dévora en pâlissant. [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]